Présentation
de l'usine verte, la manufacture Claude et Duval
1 - L'usine verte
Article publié dans Est magazine, supplément à l’Est républicain du 11 août 2002, par Frédérique Mongel
Le conseil municipal de Saint-Dié a rejeté le plan de reconstruction proposé par Le Corbusier en 1945.
Après ce rejet, lui faire accepter la reconstruction
d'une usine en terre déodatienne n'est pas chose aisée. En 1948, Jean-Jacques
Duval, persuadé que la cité vient de passer «à côté d'une chance
historique», parvient cependant à convaincre le maître de travailler sur les
plans de l'usine familiale. La
bonneterie de l'avenue de Robache sera donc une «usine verte», concept
constituant l'un des éléments de base de la cité industrielle pensée par
l'architecte.
Les conditions naturelles (soleil, espace et verdure) président à la réalisation. Entièrement vitrée, la façade est équipée de brise-soleil. Ceux-ci sont orientés de manière à freiner l'arrivée des rayons solaires en été (chaleur et éblouissement) et permettre la pénétration de ceux-ci en hiver (luminosité accrue, économie d'énergie).
Partout, des aménagements ont été prévus pour répondre au progrès et déjà le système des fenêtres (toutes de dimension identique mais posées différemment) est novateur : elles se projettent vers l'extérieur, évitant ainsi l'encombrement.
Si les structures essentielles sont en béton, le grès, pierre reine en Déodatie, a sa place sur les pignons construits avec des pierres récupérées dans les gravats de l'ancienne bâtisse.
Adepte de la polychromie, l'architecte place des touches de couleur sur les plafonds et sur les tuyaux, symbolisant ainsi la circulation des fluides.
C'est Jean Prouvé, ami de Le Corbusier, qui signe les meubles des bureaux de cet édifice
remarquable qui, à l'époque, s'est révélé moins coûteux que les
constructions «traditionnelles».
2 - Dossier de présentation à l'Unesco
Usine Claude & Duval, Saint-Dié, 1946, France
1, avenue Robache
Classée Monument Historique le 10/05/1988: Façades, couvertures, pilotis, terrasse, bureaux.
Après l'échec du plan de Saint-Dié, Jean-Jacques Duval confie à Le Corbusier la reconstruction de sa
bonneterie, détruite aux deux tiers en novembre 1944. Le Corbusier saisit cette occasion pour réaliser une
« usine verte » ce programme standard type que Le Corbusier a intégré dans son projet de cité linéaire
industrielle publié en 1945 dans Les trois établissements humains.
Opposant l'image de l'« usine noire » héritée du XIXe siècle à celle de l'« usine verte », Le Corbusier a
l’ambition de transformer complètement le cadre architectural des lieux de production et d'influer en retour
sur la psychologie et la philosophie du travail. Dans les usines sales et étouffantes du siècle dernier, le
travail est considéré « comme la grande pénitence, la rançon de quelque crime, inconsciemment
perpétré ». A l'opposé, dans les usines vertes, « le travail peut donner à ceux qui l'accomplissent le
sentiment de sa grandeur, la perception de sa beauté». Il s'agit de réintroduire les notions de détente,
d'harmonie et de joie dans la conception des lieux de travail.
Le maître mot du nouvel organigramme industriel est l'«ordre ». Le Corbusier ne dissocie pas l'aspect
social et architectural du fonctionnalisme, il convient de séparer le parcours des matériaux et des produits
de celui des hommes.
Seule application de ces principes dans l’œuvre de Le Corbusier, l’usine Claude & Duval est toujours un
lieu de production de l’industrie textile.